De la liesse à la désillusion, l’après baccalauréat en Afrique

Article : De la liesse à la désillusion, l’après baccalauréat en Afrique
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20 juillet 2023

De la liesse à la désillusion, l’après baccalauréat en Afrique

Le mercredi 12 juillet 2023 a eu lieu la première délibération de l’examen du baccalauréat au Bénin. Dans les maisons et les rues, les cris de joie se sont fait entendre. Une liesse qui les jours suivants, cédera vite place à un tas de questions. 

Cette année, ils étaient 76 104 au Bénin à passer cet examen dont 63,08 % ont été déclarés admissibles. À travers les générations, il est resté le même cet engouement que suscite le bac. Le temps précédant la proclamation des résultats pour certains parents et les candidats, semble être un véritable supplice. Je me rappelle comme si c’était hier de ce jour où je fus déclarer admissible. Ma première réaction sans surprise fut un bond en l’air suivi d’un grand cri de joie. Je venais comme n’avait de cesse de me le dire ma mère de faire mon entrée dans la cour des grands. La tête pleine de rêves et d’ambitions, je n’avais qu’une seule envie, partir à l’assaut de l’univers qui n’attendait que moi. Sur le coup, j’étais loin de m’imaginer que la vie après le bac était tout sauf un long fleuve paisible. 

La direction de l’Office du baccalauréat à Cotonou. Crédit photo : Aimé DA CRUZ

Le casse-tête du choix de filière

On était que le lendemain de la proclamation des résultats et déjà j’étais face à un dilemme. Quelle filière choisir ? En Afrique, que faire après le bac est trop souvent relégué au second plan. « J’y penserai une fois mon bac en poche », m’a dit un jeune adolescent de mon quartier quand je lui ai posé la question de savoir ce qu’il envisageait de faire après le bac. C’est un secret de polichinelle, bon nombre de bacheliers choisissent des filières qu’une connaissance, un ami, un parent ou un enseignant leur a conseillé. Des filières qui parfois mènent au chômage ou dans lesquelles ils connaîtront des échecs successifs, ou l’abandon. D’autre part, certains ne pourront s’offrir la formation de leur choix par manque de moyens. D’autres encore, ne verront jamais les portes de l’université. Pour les parents avertis, ils ont appris à connaître leurs enfants. Ils connaissent leurs aptitudes et ce qui les passionne, et les orientent non pas sans tenir compte de la demande sur le marché de l’emploi. Encore que, certains parmi ces enfants dont les parents comprennent l’enjeu du choix de filière, devront faire une croix sur leur filière de rêve parce que celle-ci est indisponible dans leur pays. Les plus chanceux eux s’envoleront vers d’autres horizons.

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L’enfer des universités publiques

Les images de ma première journée d’étudiant sont encore présentes dans ma tête. On m’avait dit tellement de choses à propos de l’université que je croyais tout connaître. Je me sentais privilégié de pouvoir m’inscrire dans une école et non pas dans une faculté classique ( où les chances d’insertion sont plus infirmes). Cependant, je ne tardai pas à me rendre à l’évidence. Au fond, Il n’y avait pas une si grande différence entre les écoles dites professionnelles et les facultés.

L’université d’Abomey-Calavi,
la plus grande université publique du Bénin.
Crédit photo : Aimé DA CRUZ

Ma première déception fut l’accueil très froid du personnel administratif pas très courtois. Ensuite, ma seconde et plus grande déception, l’effectif pléthorique. Nous étions près de 450 inscrits dans ma filière… Et pour boucler la chaîne des déceptions, le mode d’apprentissage qui ne permet pas vraiment d’acquérir des compétences. Il faut bûcher et rendre sans trop réfléchir, comme si nous eussions été des robots. Dans le même temps, je voyais aussi le calvaire des étudiants inscrits dans les facultés. Effectifs pléthoriques, échec de masse, manque d’amphis et manque de places assises. L’opposé total du monde meilleur qu’on s’imagine avant le bac. 

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Un diplôme qui n’a plus toute sa valeur

On aura beau se poser la question, on n’arrivera pas à comprendre le bien-fondé de cette fixation sur le bac. Un simple diplôme qui fait courir parents et apprenants, et qui plonge dans une profonde dépression les candidats recalés. Et pourtant, le bac n’a plus toute sa valeur. Autrefois, si le bac suscitait un grand intérêt en Afrique, c’est parce qu’il ouvrait automatiquement la voie au monde professionnel. De nos jours, la donne a plus ou moins changé. En effet, les exigences du marché de l’emploi ont considérablement élevé les standards. Il est loin l’image du ‘’ Akowé ‘’ , intellectuel au col blanc dont on affublait les nouveaux bacheliers et qui inspirait un grand respect. Ce n’est pas le bas niveau des étudiants d’aujourd’hui qui démontrera le contraire. Il est de nos jours fréquent de voir des détenteurs d’un master aligner plusieurs fautes dans une même phrase. En son temps, on ne me l’a pas dit. Mais, j’ai fini par le comprendre. Dans l’ensemble, le bac est juste le début d’un combat acharné pour avoir une place sous le soleil. 

Crédit photo: Iwaria

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